Les points de Lagrange

ou

Lagrange en équilibre

Fig 2
Puits de gravitation générés par un système de deux astres

 

Un peu d’histoire :

Les lois fondamentales de la mécanique céleste sont nées au 16 ème et 17 ème siècle. Copernic, Tycho Brahé, Galilée, Kepler et Newton vont comprendre et décrire ces lois et celles de la gravitation appliquées à deux corps.

Newton, a énoncé sa loi qui dit que "les corps s’attirent avec une force proportionnelle au produit de leur masse et inversement proportionnelle au carré de leur distance ". Il va s’intéresser, sans y parvenir, à décrire le comportement de trois corps, sujet qui a passionné beaucoup de mathématiciens…

Puis au 18ième siècle le mathématicien Joseph Louis Lagrange déduisit mathématiquement qu’un couple d’astres en interaction gravitationnelle (par exemple le Soleil et la Terre) possédait dans son voisinage 5 zones ou points d’équilibre, qu’on nomma les points de Lagrange. (Fig.1)

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Les deux autres, L4 et L5, sont sur des positions stables (la balle étant à l’intérieur d’une vasque) et sont situés réciproquement aux sommets de deux triangles équilatéraux ayant comme base commune le segment Soleil-Terre.

Les points L3, L4 et L5, sont sur l’orbite terrestre. Il est relativement facile de les positionner géométriquement.

L3 est diamétralement opposé à la Terre et se trouve à 1 UA (Unité Astronomique) derrière le Soleil, par rapport à la terre. L4 et L5 sont aux sommets des triangles équilatéraux. Par conséquent L4 se situe sur l’orbite terrestre à 1 UA en avant de la Terre, tandis que L5 se situe à 1 UA en arrière de la Terre.

Les courbes de niveaux permettent de visualiser le relief sur une carte géographique. Parallèlement, les équipotentielles des lobes de Roche permettent de voir le "relief " gravitationnel dans l’environnement des astres. Sur la figure ci-dessus, fig.2, nous retrouvons tous les éléments de le fig.1, associés à ces équipotentielles, représentées en lignes dorées. les points de Lagrange sont en rouge.
On constate que des lignes équipotentielles se referment autour de L4 et L5 qui se retrouvent ainsi à l’intérieur d’une zone close, d’où leur stabilité. La situation de L1, L2 et L3 est différente puisque leurs zones respectives sont « ouvertes » avec plusieurs échappatoires possible, d’où leur instabilité.


Moyens de calcul :

Je renvoie le lecteur qui s'intéresse aux moyens de calcul mathématique des différents points de Lagrange aux articles suivants : Orbites dans l'espace du Dr David P. stern;
Calul de la position de L1-Terre : 1 492 000 Kms. Distance du point L1.

Le calcul de la position de L2- Terre donne la valeur de 1502 000 Kms.
Comparativement au point L1, la distance à la Terre du point L2 est supérieure de seulement 10 000 Km.

Les missions NGST, DARWIN, GAIA, devraient être placées autour du point L2.

Calcul de la position L4 et L5.

Un autre projet dans les années a venir est de placer une mission de trois satellites au point L5 pour y faire des mesures par interférométrie laser. Ces points L4 et L5 ont par ailleurs été visités par des sondes spatiales lors de différentes missions.

Et dans le système solaire ?

Mercure, Venus et la Terre ne possèdent pas d'objets "troyens" (astéroïdes gravitant dans la zone des points de Lagrange L4 et L5 d'un couple d'astres); excepté peut être l'astéroïde Cruithne qui peut à la limite être considéré comme un astéroïde troyen de la Terre mais d'un genre très particulier.


C'est Jupiter qui est le plus célèbre pour ses astéroïdes troyens, on en dénombre actuellement près d'un millier repartis dans les deux zones L4 et L5. Jupiter possède une excentricité de 0,048, soit trois fois celle de la Terre, ces astéroïdes s'éparpillent sur deux zones très vastes et la gamme des inclinaisons de leurs orbites, par rapport a celle de Jupiter, est énorme (jusqu'a 40 degrés).

La planète Mars, qui gravite parmi les premiers objets de la ceinture d'astéroïdes, possède deux astéroïdes troyens. Mars a une excentricité de 0,093 près de 6 fois celle de la Terre.

Il existe également plusieurs cas dans le système Saturnien.Le satellite Hélène est un troyen L4 de Dioné. Le trio Télesto, Téthys, Calypso. Télesto est au point L4 de Téthys tandis que Calypso est au point L5.
Epiméthée est a Janus ce que Cruithne est a la Terre; c'est a dire qu'a long terme son positionnement par rapport a Janus évolue en une boucle en forme de fer a cheval d'environ 240 degrés autour de Saturne. Les trois points L4, L3 et L5 (dans cet ordre) du couple Janus-Saturne sont englobés à l'intérieur de cette boucle en fer a cheval.

L'astronome Kordylewski a observé des concentrations de poussières dans les zones L4 et L5 du couple Lune-Terre, lesquelles sont si faibles qu'elles sont particulièrement difficiles à observer.

Antoine Barakat
17.03.05

Qui est Lagrange ?

Joseph-louis Lagrange, de son vrai nom Giuseppe Lodovico Lagrangia, il est né le 25 juin 1736 à Turin, capitale du royaume de Sardaigne. Lagrange étudia à l’université de sa ville natale; son intérêt pour les mathématiques se manifeste vers 17 ans, à la lecture d’un mémoire de Halley sur l’utilisation de l’algèbre en optique. Il se plonge alors dans l’étude des mathématiques.

En l’été 1755, deux ans seulement après le début de ses travaux, dans une lettre à Euler (alors le plus grand mathématicien vivant) il décrit la détermination de la courbe tautochrone (la courbe telle que deux mobiles identiques lâchés au même moment en des points différents de la courbe arrivent au point le plus bas au même moment).
Sa méthode donnera naissance au « Calcul des variations ». Cet échange est le prémisse d’une riche correspondance entre Lagrange et Euler.

A la fin de cette même année 1755, Lagrange devient professeur à l’école d’artillerie de Turin, ville où il fonde en 1757 une académie des sciences.

Son talent est très vite reconnu, et il écrit durant ses premières années de brillants mémoires où il applique les méthodes du calcul des variations à la mécanique (propagation du son, problème des n-corps, cordes vibrantes).

En 1764, Lagrange gagne le Grand Prix de l’Académie des Sciences de Paris, pour son travail sur les librations de la lune, c’est-à-dire les petites perturbations de son orbite, et sur ce phénomène étrange qui fait que la lune présente toujours la même face à la terre. Lagrange deviendra un véritable habitué de ce prix, le gagnant à nouveau en 1772, 1774 et 1780.

En 1766, Lagrange succède à Euler au poste important de directeur des mathématiques à l’Académie des Sciences de Berlin. Il y passera 20 ans, d’une grande productivité. Il publie avec une régularité impressionnante des mémoires qui touchent tous les domaines des mathématiques et de la mécanique : astronomie, probabilités, théorie des équations algébriques (son travail sur les racines ouvre la voie à Abel et Galois), équations différentielles, théorie des fonctions.

Lagrange excelle particulièrement en arithmétique, en résolvant plusieurs conjectures difficiles et en prouvant que tout entier naturel est somme de 4 carrés.

La vie privée de Lagrange fut moins heureuse. Il souffre de dépression et s’il se marie en 1767 avec une de ses cousines (il est veuf en 1783), il n’a pas d’enfants, et on dit que ce mariage est peu heureux. Les dernières années à Berlin sont consacrées à l’étude du monumental "Traité de Mécanique Analytique", où il reprend, complète et unifie les connaissances accumulées depuis Newton. Ce livre, qui devient pour tous ses contemporains une référence, se veut notamment une référence de l’utilisation des équations différentielles en mécanique.

En 1787, après la mort de l’Empereur Frédéric II, Lagrange part pour la France où il devient membre de l’Académie des Sciences de Paris. Il est un des rares à traverser la Révolution sans être inquiété: il est même Président de la Commission des poids et des mesures, et est à ce titre un des pères du système métrique et de l’adoption de la division décimale des mesures. Les événements le marquent cependant beaucoup, en particulier le guillotinage du chimiste Lavoisier, au sujet duquel il déclare : "Il a fallu un instant pour couper sa tête, et un siècle ne suffira pas pour en produire une si bien faite".

Lagrange participe encore à la création de l’Ecole Polytechnique, provisoirement nommée Ecole Centrale des Travaux Publics, dont il est le premier professeur d’analyse, d’ailleurs peu apprécié. Il écrit encore 2 traités mathématiques (Théorie des fonctions analytiques - Résolution des équations numériques), moins bien accueillis que celui de mécanique analytique. Il se remarie en 1792 avec une jeune fille qui lui est toute dévouée. Il décède le 10 avril 1813, après avoir reçu de Napoléon Ier tous les honneurs de la nation française (comte de l’empire, Grand Officier de la Légion d’Honneur).


LES POINTS DITS DE LAGRANGE :


En travaillant sur l’interaction gravitationnelle de deux corps en rotation autour de leur centre de masse commun, Lagrange mis en évidence en 1772 l’existence d’une curiosité mathématique : il existe, sur les trajectoires elliptiques possibles, cinq zones particulières où les forces gravitationnelles ont tendance à s’équilibrer. Ces points seront baptisés « Points de Lagrange » (notés L1 à L5). Cette figure (fig.1) montre la position relative des cinq points de Lagrange dans le plan de l’orbite du corps secondaire (d’une planète par exemple) par rapport à un corps central.

Etude des points :

Dans l’étude qui suit, les deux corps en rotation seront assimilés à la Terre et au Soleil. Pour ces deux corps de très grande masse, Soleil et terre, il existe des positions privilégiées pour des corps de masse négligeable qui orbiteront à la même vitesse que celui tournant autour du corps central et qui seront fixes par rapport à cet ensemble.

Les points de Lagrange sont donc les endroits où l’attraction solaire et celle de la Terre sont exactement compensées par la force centrifuge sur orbite.

Trois sont instables, il s’agit de L1, L2 et L3 situés sur l’axe Terre-Soleil.
Un objet placé sur un de ces points sera dans un équilibre précaire (comme lorsqu’on met une balle au sommet d’une vasque renversée) au bout de quelques temps il tendra à s’en écarter et dérivera dans une orbite solaire ou terrestre. (Fig.2)

 

Fig. 1